Frédéric Chiche, le Doc Vinci de l’Estrée

Le chirurgien gynécologue est à la tête du futur centre expert dédié à l’endométriose. Il dispose d’un atout de taille : le robot révolutionnaire Da Vinci.

Il est parfois étrange de constater à quel point certains souvenirs restent profondément ancrés en nous. Des détails pourtant insignifiants resurgissent du passé comme par enchantement et soudain tout s’éclaire. Un moment insaisissable duquel surgit un élan nouveau.

C’est peut-être ce qu’a ressenti Frédéric Chiche lorsqu’il est revenu à Stains, empruntant la petite route qu’il prenait autrefois avec son père. Nous sommes en 2013 et le chirurgien se rendait à la clinique de l’Estrée proposer ses services après l’acquisition d’un robot qui allait bouleverser la prise en charge d’une pathologie peu connue jusque là, l’endométriose.

Frédéric Chiche, le Doc Vinci de l’Estrée - Ville de Stains

Le docteur Frédéric Chiche et la coordinatrice du Parcours Patients, Gladys Hatchi, au centre de l’Estrée. Des temps de sensibilisation à l’endométriose sont prévus dans les établissements scolaires dans les prochains mois.

ERRANCE MÉDICALE

C’est une maladie qui toucherait environ 10 % des femmes mais dont le diagnostic met en moyenne 7 ans avant d’être posé. Un véritable parcours du combattant(e) pour celles à qui l’on a longtemps refusé d’admettre qu’il était anormal de souffrir autant. « Ces dernières années, les associations de patients ont fait un très gros travail pour faire connaître l’endométriose et mettre en réseau patientes et spécialistes, reconnaît Frédéric Chiche. Le grand public est aujourd’hui au courant, des personnalités ont médiatisé la pathologie et puis, la société change, on ne considère plus forcément les douleurs menstruelles comme quelque chose de normal. »

L’endomètre est le tissu qui tapisse l’utérus. Sous l’effet des hormones (oestrogènes), au cours du cycle, l’endomètre s’épaissit en vue d’une potentielle grossesse, et s’il n’y a pas fécondation, il se désagrège et saigne. Ce sont les règles. Chez quasiment toutes les femmes des cellules vont remonter et migrer via les trompes et se disperser dans l’abdomen. C’est la théorie du reflux menstruel. Mais le système immunitaire s’organise pour détruire ces cellules qui ne se trouvent pas là où il faut.

Or, chez certaines femmes, le tissu endométrial qui se développe hors de l’utérus n’est pas détruit et se greffe sur les organes et provoque alors des lésions, des adhérences et des kystes ovariens, (endométriomes). C’est à ce moment-là que l’on parle d’endométriose.

« ÉVANGÉLISER » LE TERRITOIRE

Après avoir identifié le phénomène, la résistance s’organise. L’agence régionale de santé (ARS) a en effet lancé un appel à projet afin de certifier des centres spécialisés dans la prise en charge de cette pathologie. C’est notamment le cas de l’Estrée (dont la certification devrait intervenir prochainement). Ouvert depuis décembre 2019, le centre a déjà accueilli plus de deux cents patientes. L’équipe pluridisciplinaire, emmenée par Frédéric chiche, combine compétences et champs d’intervention variés, à même d’offrir une panoplie de soins efficaces et adaptés.

C’est ainsi qu’intervient le fameux robot Da Vinci, seul engin de ce type dans le département. Le chirurgien en parle avec enthousiasme : « C’est comme si on avait la tête dans le ventre du patient ! Les lunettes binoculaires offrent un effet des plus immersif, cela magnifie l’anatomie ». Le robot permet des interventions plus complexes, avec moins de douleurs pour la patiente. Il fait aujourd’hui partie de la panoplie chirurgicale, « c’est irréversible », note Frédéric Chiche. Le robot vient se substituer aux bras du chirurgien. Il est utilisé pour les cas d’endométriose sévère et en cancérologie.

S’il convient d’insister sur la prise de conscience des praticiens sur le sujet et l’amélioration de la prise en charge des patientes, un gros travail reste à réaliser pour multiplier les relais. « L’acte de sensibilisation est au moins aussi important que l’acte de soin. Il faut mobiliser tous les acteurs au sein d’un même territoire. L’endométriose est aujourd’hui la deuxième plus grosse préoccupation des gynécologues après le cancer du sein », affirme le chirurgien.

• M.B.

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